Achille, Pierre FELIX, né à Paris le 22 mai 1801, est l’enfant illégitime de Anne, Marguerite, Louise FELIX et de Pierre VIGIER. Ce n’est que le 23 septembre 1818 qu’Achille sera autorisé par ordonnance royale à porter le nom de VIGIER à la suite de son patronyme. Toutefois, avant d’aborder la vie du fils, il convient d’évoquer le père, Pierre VIGIER (1760-1817).
Pierre VIGIER était né en 1760 au sein d’une famille modeste dans un petit village d’Auvergne. Il fit de belles études à la faculté de droit de Paris et devint procureur au Parlement de Paris. Avec les tourments de la Révolution, le jeune homme décida de changer d’orientation et acquit, le 8 juillet 1791, des parts dans la société des Bains Publics de Paris. Ces bains chauds étaient répartis sur deux bateaux à quai sur la Seine. En dépit de litiges et de multiples procès avec son associé et ses descendants, Pierre VIGIER fit rapidement fortune grâce à son sens aigu des affaires. Il put ainsi acquérir plusieurs importantes propriétés dont, le 15 juillet 1797, le domaine de Grand-Vaux à Savigny-sur-Orge qu’il ne cessa d’agrandir jusqu’à sa mort qui survint en ces mêmes lieux le 16 septembre 1817. C’est son fils Achille, alors âgé de 16 ans, qui hérita de tous les biens immeubles de son père, parmi lesquels les bains publics de Paris, le château de Grand-Vaux et le moulin de Petit-Vaux, et diverses propriétés à Paris ou en région parisienne.
Achille VIGIER, décrit comme mesurant 1,72 mètre et marqué d’une cicatrice au menton, est donc riche très jeune. Cela lui permet d’épouser peu après, le 5 août 1820, une jeune fille de 15 ans, Joséphine, Louise, Antoinette DAVOUT, fille du prince et de la princesse d’Eckmühl. Outre le Maréchal et son épouse, de nombreuses personnalités assistent à ce mariage célébré par Jean Antoine MILLET, maire de Savigny-sur-Orge. Dès lors, Achille porta le titre de comte VIGIER, titre de source douteuse qui attira à Achille quelques quolibets fondés sur l’origine de sa fortune ( Chevalier du Bain, Comte du Robinet, etc ). Malheureusement, l’union d’Achille et de Joséphine sera très courte puisque cette dernière meurt le 19 août 1821, juste après avoir mis au monde un petit Louis qui sera baptisé sous le prénom de Joseph. Il est à noter que la Maréchale princesse d’Eckmühl inaugurera, en 1847, une nouvelle école à Savigny-sur-Orge qui portera le nom de Joséphine en souvenir de sa fille.
Ce drame n’empêche pas le jeune veuf de devenir Maire de Savigny-sur-Orge en 1823, succédant ainsi à son illustre beau-père décédé. Son mandat sera renouvelé en 1826, et il ne l’abandonnera qu’au bout de huit ans. En effet, le 3 juin 1824, Achille VIGIER s’est remarié avec Louise, Sophie, Agathe FRERE, fille d’une riche famille bretonne (avec qui il eut un second fils prénommé Georges). En 1831, il abandonne alors son mandat de maire pour aller se faire élire député dans le Morbihan où sa belle-famille était propriétaire. Mais le comte VIGIER conserve sa fonction de conseiller municipal de Savigny-sur-Orge et, évidemment, son château de Grand-Vaux où il reçoit volontiers le Tout-Paris pour des parties de chasse et des soirées bien arrosées. Une de ces soirées va d’ailleurs faire scandale le 27 septembre 1835. Il est vrai que, parmi les participants, on compte des personnages très en vue dont le moindre n’est pas le ministre Adolphe THIERS. La polémique sur "les orgies de Grand-Vaux" [1]s’étalera pendant plusieurs semaines dans la presse nationale.
Cela ne nuit pas à la carrière politique d’Achille VIGIER, réélu député dans sa circonscription de Vannes et conseiller général. Fidèle soutien du roi Louis-Philippe, le comte VIGIER, nommé Pair de France le 14 juillet 1846, n’abandonnera la vie politique ( à l’exception de son mandat de conseiller municipal de Savigny ) qu’à la Révolution de 1848 qui mettra un terme définitif à la monarchie. Il semble que le comte VIGIER ait essayé de récupérer les titres héréditaires de prince d’Eckmühl et de duc d’Auerstaedt demeurés vacants en 1853 au décès de Louis Napoléon DAVOUT, mais que la maréchale s’y opposa.
Achille VIGIER s’éteindra dans son hôtel parisien le 17 janvier 1868. Son fils aîné Joseph, né de son union avec Joséphine DAVOUT, héritera du château de Grand-Vaux (qu’il revendra en 1872) et, quelques mois plus tard, au décès de sa grand-mère la Maréchale, du château de Savigny-sur-Orge aujourd’hui le lycée Jean-Baptiste Corot. Et c’est le fils de Joseph, Henri, qui publiera en 1898 une biographie en deux volumes de son arrière-grand-père, le Maréchal DAVOUT.
Pour plus de renseignements sur la famille VIGIER, on pourra se reporter au livre de M. André BOURGOIN " La dynastie Vigier à Savigny-sur-Orge et à Lamorlaye ", 1995, (consultable au Service Archives de la mairie ).
[1] Chateaubriand : "Devenu président du conseil et ministre des affaires étrangères, M. Thiers s’extasie aux intrigues diplomatiques de l’école Talleyrand ; il s’expose à se faire prendre pour un turlupin à la suite, faute d’aplomb, de gravité et de silence. On peut faire fi du sérieux et des grandeurs de l’âme, mais il ne faut pas le dire, avant d’avoir amené le monde subjugué à s’asseoir aux orgies de Grand-Vaux". (Mémoires d’Outre-Tombe)