Davout, l?organisateur véritable de l?armée de 1815

Par Pascal Cyr, docteur en histoire spécialisé dans l?histoire de la Révolution française, du Consulat et de l?Empire.
(Source : Pascal Cyr « Davout, l?organisateur véritable de l?armée de 1815 », Napoleonica. La Revue 3/2011 (N° 12), p. 25-43).
www.cairn.info/revue-napoleonica-la-revue-2011-3-page-25.htm.

Davout, l?organisateur véritable de l?armée de 1815

À son retour de l?île d?Elbe, Napoléon comprend très rapidement qu?il devra faire face à l?ensemble des grandes puissances européennes : l?Autriche, la Prusse, la Russie et l?Angleterre. Unies contre la France et son chef, ces dernières sont en mesure de mobiliser plus d?un million de soldats. Afin de contrebalancer ces forces gigantesques, Napoléon estime qu?il pourra, dès le 1er octobre 1815, incorporer sous les drapeaux plus de 800 000 soldats [1]. Mais en attendant, il ne dispose que de 235 000 hommes dont la plupart sont dispersés dans toute la France. S?il est facile de mobiliser et de concentrer des soldats, il est beaucoup plus difficile de les équiper. Alors qu?il regarde attentivement l?état des finances que lui présente Gaudin, le ministre des Finances, Napoléon se rend compte que la tâche sera des plus difficiles. En fait, les recettes ne sont que de 618 millions de francs et de cette somme, seulement 200 millions sont attribués à la guerre [2]. Dans un rapport qu?il remet à Napoléon, le maréchal Davout, le nouveau ministre de la Guerre, estime les besoins financiers à 298 millions, ce qui fait 98 millions de plus. Mais devant la menace qui plane et les objectifs qu?il s?est fixés pour y faire face, Napoléon annonce à Gaudin qu?il lui faudra 100 millions de plus [3].

Très hypothétique, le budget de la guerre devrait atteindre la somme totale de 400 millions de francs. Pour faire entrer l?argent dans les coffres, l?Empereur envisage divers expédients : couper dans les autres ministères, augmenter les ventes de bois de l?État, augmenter les droits de douane, effectuer la vente des rentes de la caisse d?amortissement et augmenter les contributions indirectes sur les produits de luxe. Il compte également sur un emprunt obligatoire de 150 millions qui sera contracté auprès des propriétaires fonciers. Selon les mesures identifiées et les chiffres compilés par Pierre Branda, on constate que Napoléon espère obtenir 884 millions de francs pour équilibrer son budget [4]. Pour ramener la confiance de l?ensemble des élites économiques, il compte sur la victoire. Une victoire qui leur prouvera à tous que son pouvoir est solide et durable. Mais en attendant qu?elle se concrétise sur le champ de bataille, Davout doit surmonter de nombreuses difficultés qui entravent la réorganisation logistique de l?armée. Afin d?équiper l?armée en fusils, en chevaux, en vêtements et en vivres, il devra composer avec des problématiques diverses reliées à la production d?armement, au manque d?argent, à la pénurie de certaines matières premières et, enfin, avec l?Empereur lui-même dont les exigences ne cadrent pas toujours avec les possibilités réelles du pays. Dans cet article, nous allons examiner en détail ces différentes problématiques et voir dans quelle mesure le maréchal Davout, qui a su y faire face, est l?organisateur véritable de l?armée en 1815.

I) L?armement

Suite à l?abdication de Napoléon en avril 1814, les dépôts sont remplis de fusils défectueux. Aussitôt, le gouvernement de Louis XVIII entreprend de les faire réparer, mais lorsque Napoléon revient d?exil, il constate que ce travail est loin d?être terminé. Dans son rapport, Davout lui fait savoir que les arsenaux et les magasins des corps d?armée ne contiennent que 195 000 fusils. De ce nombre, 74 000 devront subir des réparations [5]. Évidemment, ce n?est pas suffisant pour armer la totalité des troupes qui devront faire face aux coalisés. Napoléon ne perd pas de temps et donne l?ordre de commencer la production.

Mon cousin, j?ai signé le décret que vous m?avez proposé pour les commandes de fusils. Je ne connais rien de plus urgent. Je désire que le modèle 1777 soit pour les troupes de ligne, et que tout le no 1 soit pour les gardes nationales. Serait-il possible de fabriquer 150 000 du modèle 1774 ? Cela ferait alors 400 000 fusils pour cette année. Faites-moi un rapport sur les moyens à prendre pour réparer les vieilles armes. Je désirerais que la manufacture de Tulle fût triplée. Je désirerais également tripler la manufacture de Versailles. Les événements de l?année passée font assez connaître la raison de ces dispositions [6].

Le 29 mars, un décret en ce sens est publié dans le Bulletin des lois. Tous les ouvriers, exemptés de la conscription depuis l?An VIII, doivent se rendre travailler dans les manufactures impériales afin de produire 235 000 fusils et mousquetons en plus de 15 000 paires de pistolets [7]. Cette demande est pour le moins chimérique car, à son apogée, l?Empire n?a jamais été en mesure d?atteindre de tels objectifs. Quelques jours plus tard, en raison de sa capacité limitée de production et des problèmes techniques que rencontrent les fabriques, Napoléon s?aperçoit qu?il doit d?abord cibler ses priorités.

Mon Cousin, on a fait aux mousquets et aux pistolets quelques changements qui ralentissent la fabrication. Je pense que vous devez ordonner qu?on cesse de fabriquer des pistolets afin d?accélérer la fabrication de fusils. Faites faire des baïonnettes dans les coutelleries, telles que Langres et Moulins, etc. Présentez un projet de décret pour créer sur-le-champ des machines pour pouvoir fabriquer des platines. Faites remettre en activité tous les ateliers à Paris et ordonnez la fabrication des platines de cuivre, conformément au modèle que j?ai adopté l?année dernière. Il faut prendre des mesures pour encourager les manufacturiers d?armes à faire de grands approvisionnements en acier [8].

Par divers expédients, Napoléon tente de régler des problèmes auxquels il n?a jamais été en mesure d?apporter de solutions en quatorze années de pouvoir. Cependant, bénéficiant de l?industrie mécanique et métallurgique développée au XVIIIe par les ouvriers en métaux et les mécaniciens anglais, il peut se reposer sur la région parisienne pour tenter de compenser les carences de la production. La capitale, dans laquelle sont concentrées la majorité des fabriques d?armes, produit alors quincaillerie fine, outillage de précision, mécaniques diverses pour l?industrie textile, équipements lourds destinés aux houillères, fonderies et tôleries.

En théorie, si les capacités de fabrication de la région parisienne semblent assurer les besoins immédiats de l?armée, il faut souligner que la crise de 1811 a eu des impacts négatifs sur le développement de la production métallurgique. Pour ce qui est de l?année 1815, on constate que les grandes infrastructures sont toujours presque inexistantes et que les techniques traditionnelles n?ont guère évolué depuis la Révolution. Par conséquent, hormis l?Alsace, qui a développé une industrie métallurgique dérivée de la mécanisation de l?industrie textile, les autres régions de France n?ont pas les moyens d?assurer une production suffisante qui permettrait à Napoléon d?atteindre ses objectifs en matière de fusils. Dans ces conditions, on se peut se demander comment il peut ordonner de créer de nouvelles machines pour les platines dans un délai si court. De plus, l?acquisition de la matière première a toujours été l?un des principaux problèmes. Par exemple, en ce qui concerne l?approvisionnement en acier, là encore, les objectifs de l?Empereur surpassent les possibilités réelles. Même si l?Empire a contribué à faire entrer la France dans l?ère industrielle, la sidérurgie a connu un développement insignifiant au cours de cette période. Seul Le Creusot, dans la Saône-et-Loire, possède quatre hauts-fourneaux au coke, ce qui est fort insuffisant pour constituer, selon le v?u de l?Empereur, de grands approvisionnements en acier [9] . Et enfin, Davout informe Napoléon que les capacités de l?industrie sont limitées en raison de la pénurie d?ouvriers spécialisés et de matériaux.

Mon Cousin, j?ai reçu votre lettre du 12 de ce mois, dans laquelle vous me faites connaître que vous manquez d?armuriers. Cependant le préfet de police m?a rendu compte qu?un grand nombre d?ouvriers s?est rendu aux ateliers et y a été refusé. Il faudrait, dans ces circonstances, aider un peu et commander un grand nombre de bois de fusils dans le faubourg Saint-Antoine. Les ouvriers se procuraient le noyer, et, dans le cas où ce bois manquerait, on pourrait en employer un autre. On m?assure également que beaucoup de pièces de rechange pourraient être faites par des ouvriers chez eux. Il faudrait donner le plus d?extension possible à ces ateliers [10].

Le problème d?approvisionnement en bois n?est pas nouveau. Dès janvier 1812, afin de régler cette difficulté récurrente, Napoléon avait ordonné d?augmenter les coupes dans les forêts : « Sa Majesté pense qu?il faudrait faire une coupe extraordinaire de tous les bois d?orme, de noyer et autres, nécessaires pour les fusils et autres constructions de l?artillerie, de manière à en approvisionner les arsenaux pour quatre ans [11] » Il semble cependant que les coupes aient été faites sans distinction et que des arbres, qui n?avaient pas la maturité requise, ont tout de même été coupés. Ainsi, même si les exigences sont remplies sur le papier, une très large partie du stock disponible en 1815 s?avère inutilisable. On constate donc que Napoléon n?a aucune idée de la façon dont il va régler le problème d?approvisionnement en fusils puisque la lettre démontre très clairement que le système de production est complètement désorganisé. À cet effet, Napoléon se plaint à Davout que la fabrication de fusils n?avance pas.

Mon Cousin, voilà quinze jours de perdus : les ateliers d?armes ne vont pas ; il faut faire travailler à domicile. Il y a, à Paris, autant d?appareilleurs et d?ébénistes qu?il en faut ; donnez-leur les canons, baïonnettes, baguettes et platines, et faites un prix avec eux pour qu?ils montent chez eux les fusils. Que le colonel Cotty reste à la tête de cette opération ; donnez-lui quatre majors, quatre chefs de bataillon, huit capitaines, seize lieutenants ; que ces officiers d?artillerie, dont vous ne manquez pas, soient sans cesse à organiser les ateliers, à recevoir, à vérifier, à préparer des locaux, à requérir les ouvriers, les machines, les matériaux, tout ce qui est nécessaire. Encore une fois, on n?a encore rien fait. Tous ces officiers d?artillerie que vous attacherez ainsi à l?atelier de Paris et à celui de Versailles seront sous votre main pour y être envoyés en mission partout où il sera nécessaire, pour activer le mouvement des armes portatives, faire marcher les convois, et, si l?ennemi s?avançait, faire évacuer les ateliers de Maubeuge et de Charleville sur Paris ; enfin faire des inspections tous les huit jours dans toutes les manufactures [12].

Évidemment, ces ordres ne pourront pas régler tant d?années d?improvisation en la matière. Mais Napoléon compense quelque peu en faisant vider tous les dépôts du pays afin de concentrer les approvisionnements en fusils et les activités de réparation à Vincennes [13] . Toutefois, la centralisation des moyens de production ne suffit toujours pas à régler l?ensemble des problèmes et c?est d?ailleurs pourquoi Napoléon doit se tourner vers l?industrie artisanale. Il est facile de demander aux ouvriers d?assembler les armes à domicile, mais pour tous ceux qui travaillent en atelier à la fabrication des canons, des affûts et des crosses de fusils, la tâche ne pourra pas s?accomplir sans avoir l?assurance d?un approvisionnement régulier en bois et en acier. Moins d?une semaine plus tard, Davout prend sur lui de régler le problème. Il se rabat sur la réparation des fusils endommagés : « Vous donnerez les ordres les plus précis aux commandants des dépôts de faire mettre en état les armes qui ont besoin de réparation et d?y faire travailler avec la plus grande activité. Si les corps manquent d?armuriers, vous requérez messieurs les préfets d?y faire travailler les armuriers civils [14] ». Encadrés par des armuriers, des ébénistes et des serruriers sont réunis dans les ateliers établis dans les principales villes, dont Paris, qui absorbe le gros de la production [15].

Vers la fin avril, la production reprend son rythme habituel, mais elle ne sera pas en mesure d?atteindre les quotas fixés par l?Empereur. Les ayant abaissés légèrement, il espère que les ateliers produiront plus de 25 000 fusils neufs par mois [16]. Mais, en raison des problèmes structuraux déjà évoqués, la production ne s?élèvera pas au-delà de 20 000. En outre, malgré toute l?activité qu?on y met, le secteur de la réparation ne réussit pas à atteindre les objectifs de l?Empereur qui étaient de 24 000 fusils par mois [17] . Or, grâce aux initiatives de Davout, presque tous les fusils défectueux seront réparés et prêts à être distribués aux hommes [18] . Si Napoléon réussit à équiper l?armée régulière de fusils, il n?en va pas de même pour les soldats de la Garde nationale qui possèdent des armes de tout calibre et de tout type. Cette situation résulte du décret du 18 avril qui oblige tous les citoyens, payant une contribution de 50 francs, d?avoir à leur disposition un fusil, une baïonnette et une giberne [19] . Aussitôt, de nombreux conscrits rejoignent les dépôts avec des fusils de chasse et des vieilles pétoires, ce qui pose quelques problèmes sur le plan de l?approvisionnement en munitions, car les calibres ne sont pas uniformes. Afin d?armer correctement les hommes de la Garde nationale, les autorités impériales doivent se tourner vers d?autres expédients. Par exemple, des primes sont offertes aux déserteurs étrangers s?ils apportent des fusils et, de fait, une somme de 10 000 francs est mise à la disposition du directeur de l?artillerie de Mézières [20] . Le 12 juin, une circulaire est distribuée dans tous les départements afin de faire le recensement de l?ensemble des armes disponibles dans les communes [21]. Mais ces mesures ne pourront être appliquées, car les événements extérieurs en décideront autrement.

Toutefois, la fonte des canons ne pose pas de problème particulier, car les dépôts contiennent déjà 13 947 tubes. La principale difficulté réside surtout dans la fabrique d?affûts et de pièces de rechange, mais les ateliers pourvoient déjà à la tâche. En date du 15 mai, un rapport du directeur général du parc d?artillerie souligne que l?armée possède 67 batteries opérationnelles comprenant 484 canons, mais il lui manque toujours 600 000 projectiles [22]. Or Davout ne considère pas ce problème comme urgent car, dans le même document, on souligne que l?Armée du Nord bénéficie d?une réserve évaluée à 77 800 projectiles, qui sera convoyée par 100 caissons. Pour les besoins de la campagne qui se prépare en Belgique, Napoléon et Davout considèrent que c?est amplement suffisant. Concernant les cartouches, plus de 12 millions sont fabriqués en deux mois. Bien sûr, il y a eu quelques actes de sabotage. À Lille, par exemple, on rapporte que de fausses cartouches remplies de son ont été distribuées aux soldats [23] . Montée en épingle par certains auteurs, cette affaire n?est en fait qu?un acte isolé et n?a eu aucun impact sur le déroulement des opérations. Lorsqu?ils entrent en campagne, les soldats disposent de 50 cartouches dans leur giberne et de 50 autres dans les caissons des parcs. En tout, l?Armée du Nord emporte avec elle 5 500 000 cartouches [24]. Ainsi, malgré les nombreux problèmes rencontrés par la production, l?armée, le 15 juin 1815, dispose de l?ensemble de son armement. Toutefois, il n?y a plus de réserves disponibles. Il faudra donc s?approvisionner sur le dos des vaincus.

II) L?habillement

Sous la Restauration, la production d?habits militaires n?a guère évolué parce que le gouvernement royal ne s?est pas occupé de pourvoir les magasins vidés lors des campagnes de 1812 et 1813. En fait, sur un budget qui totalise 200 millions de francs, moins de quatre furent consacrés à la confection d?uniformes et de souliers. Mais de cette somme, un million seulement a été versé au profit de l?intendance [25] . Pour Napoléon, le temps presse, car les ateliers de France devront confectionner, en moins de deux mois, plus de 100 000 habits et paires de souliers. Afin d?atteindre cet objectif, le plan de Davout consiste à centraliser les activités de fabrication dans les régions de Paris et Rouen tandis que le dépôt principal de l?habillement sera situé à Versailles, ce qui lui permettra de contrôler la production et l?acheminement du matériel vers les différents corps d?armée. En attendant, on l?informe qu?il y a déjà 11 000 uniformes disponibles dans les magasins répartis sur l?ensemble du territoire. Cette première distribution pourra suppléer aux besoins les plus urgents.

Quant à la capacité de production, se référant aux chiffres de l?Empereur, Davout estime que les ateliers de Paris pourront fabriquer 1 250 habits par jour. Cependant, il y a des conditions à remplir. Dans un premier temps, avant de commencer la production, il lui faut payer les créances que l?État doit aux fournisseurs et aux fabricants dont la somme totalise environ 14 millions de francs. À cette somme, s?ajoute une autre de 6 550 224 francs pour l?habillement de l?armée régulière. Afin de commencer la production et de rétablir le crédit, Davout propose qu?une avance de 4 728 782 francs soit faite aux fabricants et aux fournisseurs [26] . En tout, Napoléon accorde 13 millions de francs pour cet objet, mais en raison de ses problèmes financiers, il ne réussit qu?à débloquer deux millions [27]. En conséquence, la fabrication de souliers ne pourra débuter qu?au mois de mai. Très rapidement, les problèmes apparaissent, car les fabricants de Paris, en plus d?exiger les arriérés, refusent d?engager les travaux sans une avance de 3 750 000 francs payables dans les vingt premiers jours. Pour régler ce conflit, Daru les fait convoquer le 18 avril au matin. Ont-ils accepté d?être payés en bons du Trésor ou en domaines nationaux comme l?avait suggéré Davout ? À la lumière des documents que nous possédons, il semble qu?une majorité de fournisseurs a accepté de collaborer avec le gouvernement impérial. Mais pour le moment, la situation est pour le moins problématique car, si Davout exige que les fournisseurs soient payés rapidement, c?est parce que les hommes sur le terrain manquent de tout.

De tous les côtés, il arrive des réclamations de la part des corps, qui ne peuvent habiller les soldats qu?ils ont reçus, en vertu de l?appel qui a été fait il y a trois ou quatre mois. Plusieurs raisons sont données. Les uns annoncent n?avoir pas assez de draps ; les autres manquent de fonds ; d?autres, parce qu?ils ont été obligés d?acheter des draps qui étaient d?une trop mauvaise qualité. On craint qu?il n?y ait pas en ce moment de drap bleu pour la troupe en suffisante quantité, on propose d?augmenter les métiers, ce qui demande un temps considérable. Ne pourrait-on pas, en attendant qu?on ait le drap bleu nécessaire, habiller les soldats avec une bonne capote, pantalon, veste et guêtres ? Dans la campagne dernière, la plus grande partie des troupes alliées étaient habillées de cette manière, et cependant la saison était rude [28].

En fait, Davout constate que les fabricants n?ont pas assez d?indigo pour teindre les draps en bleu et en raison de l?absence de demande pour cette matière, le gouvernement royal n?a pas jugé bon de constituer de réserves. De plus, malgré les tractations de Daru, de nombreux fournisseurs refusent toujours de livrer des draps, ce qui pousse Davout à prendre des mesures expéditives [29]. Par le truchement d?une circulaire émanant du bureau de l?habillement, il fait d?abord savoir à tous les secteurs de l?administration, civile et militaire, que l?Empereur accepte les prix fixés par les fabricants. Mais les négociants et les fabricants récalcitrants seront forcés de fournir tout le matériel dont l?armée a besoin. En outre, Davout leur fait également savoir qu?ils ne seront payés que lorsque les finances de l?État le permettront [30]. Il est vrai que, pour le moment, les crédits demeurent limités car, lorsque Davout demande à Napoléon l?autorisation d?établir des ateliers à Lyon pour la confection de 20 000 uniformes, ce dernier approuve, mais seulement pour 6 000 [31]. Il faut donc attendre la victoire, ce qui entraînera la rentrée de nouvelles ressources financières et matérielles.

En ce qui concerne la fabrication de souliers, dont l?objet est d?une importance primordiale, Davout estime qu?il faut quatre paires par soldat, mais il sait pertinemment bien que cela n?est pas possible. Afin de se rapprocher de cet objectif, il est nécessaire de constituer à Paris une réserve de 100 à 150 mille paires de souliers qui, par la suite, seront directement envoyées aux corps qui se maintiennent sur la frontière mais, pour constituer une telle réserve, il lui faut 750 000 francs. Ainsi, devant toujours composer avec ce manque chronique d?argent, il se doit de revoir ses objectifs à la baisse et de se contenter de 100 000 paires de souliers, ce qui, d?un autre côté, permet à Napoléon de faire une économie de 250 000 francs. Comme pour les effets d?habillement, Davout concentre la fabrication dans la région parisienne. Avec des militaires sur place pour surveiller les opérations, il estime que les cordonniers pourront fabriquer 1 800 paires de souliers par jour. Bien qu?ils exigent d?être payés comptant avant de commencer le travail, la confection de souliers n?a pas connu d?obstacles majeurs, puisque les documents n?indiquent pas de pénurie à cet effet [32]. En fait, les sommes dégagées quelques semaines plus tôt par Napoléon pour l?exercice du mois de mai, soit 13 millions environ, ont des conséquences positives sur le terrain [33].

À l?évidence, le maréchal Davout a été contraint de déduire de cette somme les 500 000 francs qu?il a déjà prévus pour solder les cordonniers et payer la matière première. La tâche en fut d?autant plus facile que le cuir, contrairement à l?indigo, n?est pas une matière rare en France. Par le fait même, les réserves envisagées par Davout seront complétées en juillet. En ce qui concerne l?habillement, même si quelques régiments n?ont pas encore reçu leurs uniformes, les troupes qui vont partir en campagne sont à peu près pourvues de tous leurs effets de campement [34]. Concernant la Garde nationale, les corps francs et les fédérés, les choses sont beaucoup plus problématiques. Pour habiller la Garde nationale, il faudrait 44 millions de francs. Cette somme, Napoléon ne l?a pas en caisse [35]. En attendant, il estime qu?il n?est pas nécessaire de les habiller [36].

III) La remonte

Au début des Cent-Jours, la remonte est somme toute dans un état acceptable. Malgré les campagnes précédentes et les mesures de compression effectuées par le gouvernement de Louis XVIII, ce n?est pas la catastrophe qu?on aurait pu croire. Dans son rapport présenté à l?Empereur, Davout souligne qu?il y a dans les dépôts 23 490 chevaux de cavalerie. Mais en soustrayant tous ceux qui devront être réformés parce qu?ils sont impropres au service, le nombre de montures disponibles se réduit à 21 320 [37]. Pour en augmenter le nombre, Davout a acheté 3 239 chevaux supplémentaires. Avec cet ajout, il aura un effectif de 24 559 chevaux. Napoléon n?a guère le choix de respecter les accords du gouvernement précédent, puisque le parc n?est pas même suffisant pour le pied de paix dont le chiffre se situe à 29 121 montures. Afin de remonter l?effectif à un niveau acceptable, Davout estime les besoins à 7 000 montures de plus, ce qui représente une somme de 3 066 000 francs [38]. Sans plus attendre, Napoléon ordonne à Davout de procéder à l?achat des chevaux.

Ainsi le général Bourcier achètera à Versailles : 900 chevaux de grosse cavalerie, 787 chevaux de dragons, 1 084 chevaux de lanciers, 2 633 chevaux de chasseurs, 1 152 chevaux de hussards ; en tout 6 556 chevaux. Ce qui exige à Versailles la réunion de plus 6 500 hommes et de 6 500 selles. L?effectif de notre cavalerie sera donc de 36 000 chevaux, sans y comprendre la garde. Écrivez aux colonels et aux préfets pour que, sous huit jours, les 3 200 chevaux pour lesquels il y a des marchés soient fournis.

Néanmoins, toujours conscient de sa situation financière et de la vénalité des fournisseurs, Napoléon tente par tous les moyens possibles d?économiser de l?argent.

En fixant le prix des chevaux et en les payant comptant aux cultivateurs, on gagne la commission des fournisseurs. Recommandez aux commandants des dépôts, s?ils acceptaient des chevaux qui n?eussent pas toutes les qualités prescrites, mais qui leur paraîtraient cependant propres au service, de diminuer quelque chose sur le prix. Recommandez-leur surtout de ne pas recevoir de chevaux qui n?aient jeté leur gourme et qui ne puissent, quinze jours après, entrer en campagne [39].

Pour constituer l?ensemble de son effectif, Napoléon ordonne, comme par les années passées, que la gendarmerie impériale lui cède 4 250 chevaux harnachés, ce qui lui permet de faire des économies substantielles puisqu?il ne lui reste que 2 250 chevaux à acheter chez les fournisseurs. Quant aux gendarmes, ils seront dédommagés par l?État, mais au prix préalablement fixé par l?Empereur, soit 2 040 000 francs. En outre, il ordonne une réquisition de 8 000 chevaux dans les départements afin de porter l?effectif total à 39 000, ce qui devrait s?avérer suffisant pour équiper la cavalerie, l?artillerie et le train de ravitaillement. De ce nombre, 20 000 montures seront réservées à l?usage de l?Armée du Nord [40]. Comme d?habitude, afin de payer pour l?ensemble des chevaux achetés chez les marchands, Napoléon souhaite leur distribuer des reconnaissances de dette, mais de leur côté, ces derniers ne veulent rien céder sans d?abord avoir reçu des avances.

Les colonels de cavalerie du corps d?armée me rendent compte des difficultés que mettent les fournisseurs à vouloir passer des marchés pour l?achat des chevaux, ils ne veulent rien entreprendre sans avoir reçu d?avance, ils témoignent de la répugnance, même de la crainte à recevoir leur argent des payeurs généraux. Les marchands agiront avec confiance lorsqu?ils sauront que l?argent est dans les caisses des régiments, que le payement suivra la livraison [41].

Nous ne savons pas exactement pourquoi les fournisseurs craignent d?être payés par les payeurs généraux mais, quoi qu?il en soit, cette lettre illustre avec force l?état de confiance qui existe entre les fournisseurs et Napoléon. Mais là n?est pas le seul obstacle auquel il devra faire face car déjà les préfets l?informent que la réquisition des 8 000 chevaux à l?intérieur des départements s?avère très difficile. Ils écrivent à Davout que les paysans ne céderont pas pour une somme qui se situe en dessous du taux du marché. En fait, l?État paye aux fournisseurs jusqu?à 550 francs la bête tandis que les paysans doivent se contenter de 360 francs, ce qui provoque une résistance légitime chez ces derniers. De plus, à l?intérieur de plusieurs départements, dont ceux de Seine-et-Marne, des Côtes-du-Nord et du Morbihan, les propriétaires souhaitent être payés comptant. Napoléon avait pensé payer en bons du Trésor, mais, selon Davout, ils refusent même ce mode de paiement car ce qu?ils veulent, c?est du numéraire. D?après le rapport que Davout fait parvenir à Napoléon, il envisage de passer outre et d?effectuer tout de même les réquisitions. Mais certains départements sont tellement hostiles au pouvoir en place que ce moyen n?est guère praticable. Enfin, Davout l?informe que de nombreux préfets n?arriveront pas à lever les chevaux requis. Les deux dernières campagnes ont vidé plusieurs départements, dont ceux de l?Aube, de la Meurthe et du Jura. Les solutions proposées sont celles-ci : s?entendre sur le prix, payer comptant et abaisser la taille des chevaux fixés à quatre pieds et neuf pouces [42].

Napoléon devra s?y conformer et, pour y arriver, il prend des moyens draconiens. Deux jours seulement après avoir reçu le rapport de Davout, Carnot oblige l?administration municipale de Paris à verser dans la caisse de l?armée la somme nécessaire à l?achat de 200 chevaux, soit 200 000 francs [43]. En fait, cette mesure n?est que l?application du décret du 19 avril 1815 qui stipule que les départements, par l?intermédiaire des communes, devront assumer le coût des chevaux et de l?équipement. Toutefois, dans beaucoup de cas, elles sont incapables de supporter le poids de cette charge [44]. Ainsi, le fruit des réquisitions n?arrive que très lentement. Davout estime qu?en raison des retards, les 8 000 chevaux espérés n?atteindront pas les dépôts avant le mois de juillet. Mais les problèmes ne s?arrêtent pas là, car dans les dépôts, on s?aperçoit qu?un certain nombre de montures, surtout chez les lanciers, sont impropres au service [45]. Malgré tout, l?armée disposera d?un nombre très appréciable de montures lors de son entrée en campagne. Au 1er juin, la cavalerie de ligne dispose de 35 201 chevaux. Quant à la cavalerie de la garde, elle peut compter sur un parc de 4 558 montures pour un grand total de 41 212. De ce nombre, 17 180 sont attribués à l?Armée du Nord, mais cela n?est pas suffisant pour remonter les 22 000 cavaliers prévus par Napoléon. Ainsi, concernant les 4 820 hommes qui se retrouvent au sol, ils devront attendre d?avoir des montures [46]. Afin de résorber ce problème, Napoléon demande à la gendarmerie de lui céder 2 000 chevaux de plus, mais le décret n?est publié par Davout que le 14 juin 1815, ce qui veut dire qu?ils devront être remis aux différents corps de cavalerie suite à la conclusion de la campagne qui s?annonce [47]. Quant aux autres corps d?observation, ceux de la Moselle, du Jura, du Rhin, du Var, des Alpes, de la Loire et des Pyrénées, ils doivent se partager les 24 000 autres qui restent. De toute façon, ces unités ont pour mission de retarder l?ennemi en restant sur leurs positions. Pour ce qui est des chevaux de trait, ils devront se partager 7 846 bêtes sur un cheptel qui en totalise 16 383. De ce nombre, l?Armée du Nord en absorbe 8 828 dont 2 551 sont attribués à la Garde impériale, ce qui est amplement suffisant pour traîner les 100 caissons de munitions, les canons et les ambulances [48]. Dans les parcs, il reste 7 555 chevaux, dont 5 000 avaient déjà été prêtés aux cultivateurs par le gouvernement royal afin de faire des économies sur les coûts d?entretien. Afin de compléter les effectifs, des achats sont faits chez les fournisseurs et les paysans.

Cependant, n?ayant pas les fonds nécessaires pour tout acheter, Davout réquisitionne 2 000 chevaux dans les 1 200 relais de poste que comprend la France provoquant des plaintes amères des propriétaires d?entreprises de messagerie, de voitures et de roulage de la région parisienne [49].

Concernant les harnachements, il en existe 8 224 dans les magasins militaires. Mais les gendarmes ayant l?obligation de fournir des montures déjà équipées, les achats de cette nature ne représentent pas un obstacle considérable puisqu?on procède par réquisition pour les équipements manquants [50]. Finalement, bien que les corps d?observation des frontières soient condamnés à l?immobilisme, l?Armée du Nord se révèle très mobile. Elle emporte avec elle plus de 26 000 chevaux, ce qui constitue une nouvelle indication sur les intentions de Napoléon. Frapper vite et fort. Mais si l?armée est bien équipée en matière de chevaux, les conséquences de ce nouvel effort sont catastrophiques, car la France n?a plus de réserve disponible. Pour remplacer le matériel perdu, il faudra donc se servir sur l?ennemi.

IV) Les vivres

Pour la prochaine campagne qu?il souhaite entreprendre en Belgique, Napoléon est disposé à bien pourvoir ses troupes. Par l?intermédiaire de ses informateurs, il sait que les Prussiens font de fortes réquisitions dans le pays, ce qui mécontente grandement la population belge dont les sentiments sont redevenus très favorables à la France [51]. Afin de maintenir cette faveur populaire, il n?a pas d?autre choix que de mettre tout en ?uvre pour assurer la subsistance de ses soldats. En outre, la propagande a toujours occupé une place importante dans les opérations militaires et pour Napoléon, mis au ban de l?Europe et des nations, ce serait toute une gifle infligée à la coalition si lui et son armée étaient accueillis en libérateurs. Une fois encore, la France, à travers la personne de l?Empereur, pourrait incarner ce droit des peuples que les coalisés lui ont ravi en 1813. Voilà donc pourquoi Napoléon doit nourrir ses troupes de façon adéquate. Pour lui, l?enjeu est d?une importance vitale, mais la difficulté réside toujours au niveau des finances. Et comme pour le reste, Davout propose de payer les fournisseurs de bétail en bons du Trésor [52].

Pour nourrir une armée de 150 000 hommes environ, parce qu?à cette date, le corps du général Lamarque n?est pas encore parti pour la Vendée, il faut plus de 1 000 b?ufs, ce qui équivaut à une consommation de 100 000 rations de viande. Afin d?approvisionner annuellement l?ensemble de l?armée, car les corps d?observation vivent une pénurie de nourriture, Davout conclut une entente avec le fournisseur Montessuy pour effectuer la livraison de 7 550 b?ufs, ce qui coûte au Trésor la modique somme de 1 890 000 francs. Ayant pour but de diminuer les frais et de rétablir le crédit de l?administration, Napoléon souhaite que le service des viandes fusionne avec celui des pains. Mais le temps lui manque pour mettre en ?uvre cette nouvelle réforme [53]. Malgré quelques ratés en raison du fait que les biscuits se conservent très mal, les soldats reçoivent régulièrement leurs soldes et leurs rations. À cet effet, le commandant du 6e corps se plaint contre les soldats qui se font tout de même nourrir par les habitants. Dès lors, on constate que la troupe n?a pas perdu ses vieilles habitudes.

Le général en chef est informé que des troupes de son corps d?armée se font nourrir par les habitants, des officiers même ont pu oublier tous sentiments de délicatesse et de patriotisme au point d?exiger que leurs hôtes fournissent à leur table, ce dans un des départements les plus distingués par leur dévouement à la cause sacré de l?Empereur et de la patrie ; dans de paisibles cantonnements où les troupes reçoivent avec leur solde, exactement payée, la distribution des vivres de campagne [54].

Le 12 juin 1815, donc trois jours avant le déclenchement des hostilités, l?intendant général annonce à l?Empereur que tous les corps de l?Armée du Nord sont pourvus de quatre jours de nourritures.

Jusqu?à ce moment, les magasins ont pourvu aux distributions journalières, sans avoir donné lieu à une interruption réelle de service. Sur quelques points, il existe même des excédents qui après les premiers mouvements et les distributions effectuées à l?avance pourront préparer une partie des vivres que les munitionnaires généraux devront avoir rassemblés d?ici aux 30 juin pour trois mois, et entretenir toujours à la même hauteur, aux termes de leurs marchés. Tous les corps d?armée sont pourvus de 4 jours de pain frais. Les réserves à porter à la suite de l?armée se composent de 15 jours de riz, eau-de-vie, sel, vinaigre, de 6 jours de pain biscuité, de 4 jours de viande sur pied et de 4 jours d?avoine [55]

Les structures et les ressources de la France étant les mêmes en 1805 qu?en 1815, l?Armée est approvisionnée de la même façon et pour le même nombre de jours que celle qui est partie pour Austerlitz mais, en raison des difficultés reliées à la conservation des vivres, l?intendance générale ne peut faire davantage. Toutefois, les soldats n?auront pas à souffrir de la faim puisque la campagne qui s?annonce doit être courte. Le chemin entre Avesnes et Bruxelles est beaucoup plus court que celui de Strasbourg à Ulm. Par conséquent, on pense que les hommes n?auront pas le temps de se livrer au pillage. De plus, une fois qu?ils seront vaincus, on espère que les Prussiens et les Anglais laisseront aux troupes françaises des dépôts bien remplis [56]. Or, même si Napoléon atteint son objectif sur le plan de la nourriture et si l?armée est « prête » à entrer en opération, cela n?empêchera pas les hommes de se livrer au pillage. Lors de la campagne de Belgique, le chef de la gendarmerie, le général Radet, constate alors que les hommes ne perdent pas leurs vieilles coutumes : « On a pillé des magasins à fourrage, volé des chevaux au piquet. On a pillé toute la nuit chez les Belges qui avaient tout donné de bon c?ur et pansé nos blessés [57]. » À l?évidence, l?effet de propagande que Napoléon voulait faire sur la population belge et la coalition fut manqué.

V) La France n?a plus les moyens d?équiper une armée

Le 20 juin 1815, la nouvelle de la défaite de Waterloo gagne Paris. Joseph, le frère de l?Empereur, reçoit deux lettres de ce dernier qui ne cache rien du désastre. La première, destinée au Conseil des ministres, annonce très imparfaitement la défaite de Waterloo. Mais la deuxième, de par les projets irréalistes de mobilisation dont Napoléon fait mention, nous fait connaître, et cela de façon indirecte, la situation précaire à l?intérieur de laquelle se trouvent l?armée et la France.

Tout n?est point perdu. Je suppose qu?il me restera, en réunissant mes forces, cent cinquante mille hommes. Les fédérés et les gardes nationaux qui ont du c?ur me fourniront cent mille hommes. Les bataillons de dépôt cinquante mille. J?aurai donc trois cent mille soldats à opposer de suite à l?ennemi. J?attellerai l?artillerie avec les chevaux de luxe. Je lèverai cent mille conscrits. Je les armerai avec les fusils des royalistes et des mauvaises gardes nationales. Je ferai lever en masse le Dauphiné, le Lyonnais, la Bourgogne, la Lorraine, la Champagne. Mais il faut qu?on m?aide et qu?on ne m?étourdisse point [58].

Si Napoléon tente de rester optimiste afin de ne pas abattre le moral de ses proches, il demeure néanmoins lucide sur la pénurie de chevaux et de fusils qui accable l?armée. Il est à noter que cette lettre n?est pas l?original puisqu?elle nous vient de Fleury de Chaboulon, mais dans sa relation de Sainte-Hélène, il s?exprime dans les mêmes termes.

La position de la France était critique après la bataille de Waterloo, mais non désespérée : tout avait été préparé dans l?hypothèse qu?on échouât dans l?attaque de la Belgique. 70 000 hommes étaient ralliés le 27 entre Paris et Laon ; 25 000 à 30 000 hommes, y compris les dépôts de la Garde, étaient en marche de Paris et des dépôts. Le général Rapp, avec 25 000 hommes de troupes d?élite, devait être arrivé dans les premiers jours de juillet sur la Marne ; toutes les pertes du matériel de l?artillerie étaient réparées. Paris seul contenait cinq cents pièces de campagne, et on n?en avait perdu que cent soixante-dix. Ainsi une armée de 120 000 hommes, égale à celle qui avait passé la Sambre le 15, ayant un train d?artillerie de trois cent cinquante bouches à feu, couvrirait Paris au 1er juillet [59].

Lorsque Napoléon écrit la deuxième lettre, toujours celle qui nous vient de Fleury de Chaboulon, on voit qu?il n?a pas encore mesuré toute l?étendue du désastre, tandis que, dans l?extrait de son récit, bien qu?on sente une trace de négation, il écrit surtout pour accabler les députés qui l?ont abandonné, car il insiste sur le fait que tout pouvait encore être sauvé. Mais en raison de l?état des finances, Napoléon demeure conscient qu?il ne pourra pas retourner la situation. Après avoir multiplié les reconnaissances de dettes, les émissions de bons du Trésor, et reconnu les arriérés de 1814, la dette du pays est passée de 123 millions de francs à 695 millions de francs [60]. Éloquents, les chiffres parlent par eux-mêmes.

Quoique centrale, la question financière n?est pas seule en cause car, même si l?argent n?avait pas été un problème, il aurait été bien difficile de remplacer tous les chevaux ainsi que la totalité du matériel perdu. Concernant les chevaux, la cavalerie ayant été presque détruite à Waterloo, il était maintenant presque impossible d?en trouver à nouveau. Afin de rééquiper l?armée et lui redonner toute sa mobilité, on se souvient que Davout a réquisitionné 8 000 chevaux tandis que les gendarmes et les relais de diligences furent pratiquement dépouillés. Quant aux chevaux manquants, ils ont été achetés à prix d?or chez les fournisseurs. En tout, Davout a réussi à reconstituer un parc de 41 000 montures, dont 26 000, parmi les meilleures, furent réservées à l?Armée du Nord [61]. Ainsi, même avec la plus grande volonté, il est évident que les préfets n?auront pas les moyens de faire une deuxième réquisition.

Par ailleurs, on a vu que l?approvisionnement en fusils constitue un problème de taille. Dès son arrivée aux Tuileries, Napoléon a souhaité que les ateliers de France produisent 25 000 fusils par mois. Mais, à cause des problèmes structuraux liés à l?industrie, c?est-à-dire au manque de matières premières, d?ateliers de fabrication et de main-d??uvre, on atteint à peine le chiffre de 20 000. Pour compenser ce déficit, Davout a été obligé de se tourner vers la réparation mais, si la majorité des fusils défectueux ont été réparés, l?intendance n?a pas été en mesure d?armer l?ensemble des soldats qui sont aux frontières. À l?instar de ceux-ci, la garde nationale, sur laquelle Napoléon compte alors pour combler les pertes subies pendant la campagne, manque cruellement de fusils [62] . De plus, la majorité des fuyards qui rejoignent la place forte de Laon ont abandonné leurs armes et leurs chevaux pour accélérer leur fuite [63] .

À l?instar des chevaux et des fusils, l?armée devra également composer avec une grave pénurie d?uniformes et de souliers. Dès le début du mois d?avril, Davout avait estimé le coût total de cet objet à 14 millions de francs, car avant de commencer la production, on se souvient qu?il lui a fallu payer aux fournisseurs les arriérés des années précédentes, ce qui a retardé jusqu?au mois de mai la confection de souliers et d?uniformes [64]. Même avec l?emploi des réserves d?habillement à l?intérieur des dépôts, de nombreux soldats n?ont pas eu de quoi se vêtir. Avec le désastre qui vient de survenir, il serait très surprenant que les fabricants consentent de nouvelles avances. Donc, sans argent et sans matériel, puisqu?il n?a pas obtenu cette victoire décisive qui devait lui apporter la confiance des financiers et des fournisseurs, il ne pourra pas renvoyer ce qui reste de l?armée au combat. À la lumière des rapports qu?il a sous les yeux, l?homme qui a réorganisé l?armée française pendant les Cent-Jours, le maréchal Davout, sait que la France n?a plus les moyens de poursuivre la guerre. De leur côté, n?ignorant rien de la situation militaire, financière et logistique, les députés de la Chambre, encouragés par Fouché, poussent Napoléon à la seconde abdication.

Résumé

Lorsque Napoléon revient de l?île d?Elbe, il doit de nouveau faire face à l?ensemble de l?Europe qui se coalise contre lui et surtout contre la France. Or l?armée n?est pas en état d?entrer en campagne. Le gouvernement de Louis XVIII l?ayant négligée pour satisfaire ses impératifs budgétaires, la tâche qui attend Napoléon et son gouvernement est colossale. Pour rééquiper l?armée rapidement et la rendre opérationnelle, l?Empereur nomme le maréchal Davout au poste de ministre de la Guerre. Très rapidement, à la lecture de nombreux rapports, Davout constate que l?armée manque de fusils, de chevaux, de vêtements et de vivres. Il doit composer avec le manque d?argent et avec les insuffisances de production du pays. Ainsi, sans possibilité de fabriquer les 25 000 fusils par mois que réclame l?Empereur, il demande la réparation de fusils endommagés, ce qui est tout juste suffisant pour équiper l?Armée du Nord. En ce qui concerne l?habillement, il doit négocier avec les fournisseurs qui exigent des avances tandis que, pour les chevaux, s?il arrive à payer certains fournisseurs, il doit aussi procéder à la saisie de monture chez les gendarmes et les entreprises de roulage de la région parisienne. Pour ce qui est des vivres, Davout réussit sans difficulté à approvisionner l?armée qui va partir en campagne, mais si les hommes ne manquent pas de ration, ils n?en oublient pas leurs vieilles habitudes et pillent chez les habitants. En somme, si Davout réussit un tour de force véritable en rééquipant l?armée, la France n?a plus de ressources disponibles. En cas de défaite, il serait donc impossible de recommencer cette vaste opération logistique, car les dépôts ont été vidés de leurs fusils, de leurs chevaux et de leurs uniformes. Pour Napoléon, qui compte s?approvisionner sur les magasins de l?ennemi, cette campagne, celle de 1815, se doit d?être victorieuse.

Abstract

When Napoleon returned from Elba, he was once again faced with a European coalition against him and above all against France. The French army at that time was in no fit state to begin a campaign. Since Louis XVIII?s government had privileged other budgetary imperatives before those of the army, the task facing Napoleon and his War Minister Davout was colossal. On taking up office, Davout discovered on that the army was severely lacking in guns, horses, clothing and supplies. Nor did the minister have a great deal of money available, and industrial output was down. Unable therefore to ensure production of the 25,000 guns a month that Napoleon required, Davout ordered the repair of all damaged guns, thereby providing just enough firepower, but only for the Armée du Nord. As regards clothing, he was forced to negotiate with suppliers who demanded payment up front, and for horses, he was able to purchase some and commandeer others from the gendarmes and Parisian haulage companies. Though feeding the army was not to prove problematic, the soldiers (though provided with food) did not abandon their old habits of pillaging the locals as they passed by. In short, though Davout was able to work miracles in order to refit the army, if faced with a defeat, it would have been impossible for France to perform another vast logistical exercise. The cupboard was definitively stripped bare, the depots empty of arms, uniforms and horses. For Napoleon, whose aim was to provision the army from enemy magazines, the only possible result for the campaign of 1815 was victory.

[1] Mémoires de Napoléon, III, L?île d?Elbe et les Cent-Jours, Tallandier, 2011

[2] AN, AF/IV/1933, ministère du Trésor impérial, conseil des finances, aperçu des dépenses de l?année 1815

[3] A Gaudin, ministre des Finances, Correspondance, n° 21 761, 3 avril 1815

[4] Pierre Branda, Le prix de la gloire. Napoléon et l?argent, Paris, Fayard, 2007, p. 494

[5] AN, AF/IV/1940, Davout, Rapport à Sa Majesté l?Empereur, 4 avril 1815. Voir aussi dans le même carton la lettre du général Drouot à Napoléon, 27 mars 1815

[6] A Davout, Correspondance, n° 21 703, 24 mars 1815

[7] Décret publié au Bulletin des lois, 29 mars 1815

[8] A Davout, Correspondance, n° 21 755, Paris, 2 avril 1815

[9] Ernest Labrousse et al., Histoire économique et sociale de la France : l?avènement de l?ère industrielle. Paris, PUF, 1976, tome III, p. 108-109.

[10] A Davout, Correspondance, n° 21 798, 13 avril 1815

[11] Ibid., Note dictée en conseil des ministres, 18438, Palais des Tuileries, 15 janvier 1812

[12] A Davout, ibid., n° 21 811, 15 avril 1815

[13] A Davout, ibid., n° 21 732, 27 mars 1815.

[14] Lettre de Davout à un destinataire non identifié, SHD, C16/9, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, le 24 avril 1815.

[15] Archives nationales, AF/IV/1940, Davout, Rapport à Sa Majesté l?Empereur, 14 avril 1815 - SHD, C16/20, Davout au général Lemarois, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, le ministre de la Guerre, 3 juin 1815

[16] A Davout, Correspondance, n° 21 811, 15 avril 1815.

[17] A Davout, ibid., n° 21 732, 27 mars 1815.

[18] Archives nationales, AF/IV/1940, Davout, Rapport à Sa Majesté l?Empereur, 29 avril 1815.

[19] SHD, C16/21, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, circulaire sur le recensement de toutes les armes disponibles dans les communes, 12 juin 1815. Le texte du décret n?a pas été retrouvé par l?auteur.

[20] SHD, C16/18, général Guilleminot au général Lemoine, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, 27 mai 1815. Le lieutenant général comte Guilleminot est chef de l?État-major général du 3e corps à Rocroy.

[21] SHD, C16/21, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, circulaire sur le recensement de toutes les armes disponibles dans les communes, 12 juin 1815.

[22] SHD, C14/21, général Neigre, directeur général des parcs d?artillerie, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, 13 mai 1815. - Archives nationales, AF/IV/1940, Bureau du matériel, rapport du général Evain, inspecteur général de l?artillerie, chef de la 6e division, au ministre de la Guerre, le maréchal Davout, prince d?Eckmühl, 21 mars 1815.

[23] SHD, C16/9, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, Le lieutenant général Drouet, comte d?Erlon, commandant en chef le 1er corps d?observation et la 16e division militaire à Lille, au ministre de la Guerre, 25 avril 1815.

[24] SHD, C14/21, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, le lieutenant général Neigre, directeur général des Parcs d?Artillerie de l?armée au ministre de la Guerre, 13 mai 1815.

[25] Archives nationales, AF/IV/1941, Davout, Rapport à Sa Majesté l?Empereur, 5 avril 1815.

[26] Archives nationales, AF/IV/1941, Davout, Rapport à Sa Majesté l?Empereur, 5 avril 1815. ? Davout à Mollien, Correspondance du maréchal Davout, 17 avril 1815.

[27] A Caffarelli, Correspondance de Napoléon 1er, n° 21891, 11 mai 1815.

[28] A Daru, Correspondance du maréchal Davout, 15 avril 1815.

[29] A Mouton, Correspondance du maréchal Davout, 4 mai 1815.

[30] SHD, C16/11, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, Bureau de l?habillement, Circulaires, ministre de la Guerre, 2 mai 1815.

[31] SHD/ C17/192, Correspondance du maréchal Davout, 10 juin 1815.

[32] Archives nationales, AF/IV/1941, Davout, Rapports à Sa Majesté l?Empereur, 4, 11 et 13 mai 1815.

[33] A Rapp, Correspondance, n° 21 938, 20 mai 1815.

[34] SHD, C15/4, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, Armée du Nord, l?Intendant Daure, intendant général de l?Armée du Nord au maréchal duc de Dalmatie, major général, 2 juin 1815. ? SHD, C16/21, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, lieutenant général commandant le 6e corps au ministre de la Guerre, 12 juin 1815. - Archives nationales, AF/IV/1938, Rapport à Sa Majesté l?Empereur sur la situation des différends services de l?armée au 12 juin 1815.

[35] Archives nationales, AF/IV/1933, Séance du jeudi 15 juin, présidé par le prince Joseph.

[36] A Davout, Correspondance, n° 21 984, Paris, 29 mai 1815.

[37] Cela comprend les volontaires royaux et la maison militaire du roi.

[38] Archives nationales, AF/IV/1941, Rapport fait l?Empereur par le ministre de la Guerre, le 28 mars 1815.

[39] A Davout, Correspondance, n° 21 756, 2 avril 1815.

[40] A Davout, Correspondance de Napoléon 1er, n° 21 810, 15 avril 1815, n° 21823, 18 avril ? Archives nationales, AF/IV/1941, Bureau des remontes et harnachements. Répartition entre les départements de 8 000 chevaux de cavalerie légère à lever par réquisition en exécution de l?ordre de Sa Majesté en date du 18 avril 1815. ? Archives nationales, AF/IV/1941, ministère de la Guerre. État de répartition des fonds à faire aux légions de la gendarmerie impériale qui doivent fournir des chevaux pour la remonte de la cavalerie, arrêté par le ministre de la Guerre à Paris le 19 avril 1815. ? SHD C16/9, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, le commissaire ordonnateur Barbier, chef de la 9e division du ministère de la Guerre au Baron Salamon, chef de la 11e division du même ministère, 25 avril 1815. ? A Davout, Correspondance de Napoléon 1er, n° 21 845, 27 avril 1815.

[41] SHD C16/9, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, général Vandamme, commandant le 3e corps, au ministre de la Guerre, le 24 avril 1815.

[42] Archives nationales, AF/IV/1941, Rapport à Sa Majesté par le ministre de la Guerre, le 6 mai 1815. Pour la taille des chevaux, on descendra à quatre pieds 8 pouces ½, ce qui est satisfaisant pour le service de l?armée.

[43] SHD C16/13, le ministre de l?Intérieur au comte de Bondy, préfet de la Seine, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, 8 mai 1815.

[44] Archives nationales, AF/IV/1941, Rapport à Sa Majesté par le ministre de la Guerre, le 10 juin 1815. Nous n?avons pas la copie du décret. Cependant, les termes y sont repris dans ce document.

[45] SHD C16/16, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, le lieutenant-général comte Defrance, inspecteur général de cavalerie à Saint-Dizier au ministre de la Guerre, 18 mai 1815 et maréchal de camp De Laville, destinataire inconnu, Versailles, le 16 mai 1815.

[46] Archives nationales, AF/IV/1936, Situation de l?infanterie, l?artillerie, le génie par corps et par régiment au 1er juin 1815.

[47] SHD C16/19, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, ministère de la Guerre. État des 2 000 chevaux à fournir par la gendarmerie impériale, pour la remonte des régiments de cavalerie, en exécution du décret impérial du 31 mai 1815 et circulaire du ministre de la Guerre, 14 juin 1815.

[48] Archives nationales, AF/IV/1936, situations générales au 1er juin 1815. Infanterie : 1er corps d?armée, 2e, 3e, 4e, 6e. Cavalerie : corps de réserve, 2e, 3e, 4e. ? SHD, C15/34, Situation avant et après le 20 mars. Garde impériale du 11 mai au 2 juillet. - SHD C16/8, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, le lieutenant général comte Ruty, inspecteur général d?artillerie au ministre de la guerre, 8 mai 1815.

[49] SHD C16/8, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, le lieutenant général baron Margaron au ministre de la Guerre, 21 avril 1815. Archives nationales, AF/IV/1934, Rapport de la poste impériale, Paris, 2 mai 1815.

[50] Archives nationales, AF/IV/1941, Relevé des harnachements, classés comme neufs, bons ou à réparer, 30 mars 1815.

[51] SHD C16/3, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, le lieutenant général comte D?Erlon, commandant la 16e division militaire à Lille au ministre de la Guerre, 28 mars 1815.- SHD C16/3, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, note écrite à Paris, sans signature, pour le ministre de la Guerre, 1re division militaire, 18 avril 1815. - SHD C16/10, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, le lieutenant général comte Vandamme, commandant en chef le 3e corps d?observation et la 2e division militaire à Mézières, au ministre de la Guerre, 28 avril 1815 - SHD C16/10, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, le lieutenant général comte Vandamme, commandant en chef le 3e corps d?observation et la 2e division militaire à Mézières, au ministre de la Guerre, 30 avril 1815 .

[52] SHD C15/1, Armée du Nord, 22 avril 1815. -Archives nationales, AF/IV/1941, 27 avril 1815.

[53] AF/IV/1941, 29 avril 1815. Napoléon à Davout, Correspondance, n° 21 756, 3 mai 1815.

[54] SHD C15/1, Armée du Nord, 24 mai 1815.

[55] Archives nationales, AF/IV/1938, Rapport à sa Majesté l?Empereur sur la situation des différends services de l?armée au 12 juin 1815. Signé par l?ordonnateur général Jean-Paul Daure..

[56] Les Anglais traînent toujours beaucoup de ravitaillement avec eux. La tâche est d?autant plus facile qu?ils ont une petite armée de 36 000 hommes environ. Quant aux Prussiens, ils emmagasinent les vivres qu?ils pillent sur le territoire. SHD C16/3, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, le chef de bataillon Leclaire, commandant à Bouchain au ministre de la Guerre, 25 avril 1815. Ce rapport est le résultat d?un interrogatoire de deux déserteurs qui confirment que les coalisés ont des magasins considérables.

[57] SHD C15/5, Armée du Nord, Radet, commandant en chef de la gendarmerie, au maréchal Soult, 17 juin 1815.

[58] Fleury de Chaboulon, Histoire des Cent-Jours : annoté par Napoléon. Paris, Bibliothèque des Introuvables, 2006, tome II, p. 155.

[59] Mémoires de Napoléon. III. L?île d?Elbe et les Cent-Jours.

[60] Archives nationales, AF/IV/1934, Rapport de Gaudin à Napoléon, le 1er juillet 1815. - Pierre Branda, Le prix de la gloire : Napoléon et l?argent, p. 496.

[61] A Davout, Correspondance, n° 21810, 15 avril 1815, n° 21823, 18 avril 1815, n° 21 845, 27 avril ? Archives nationales, AF/IV/1941, Bureau des remontes et harnachements. Répartition entre les départements de 8 000 chevaux de cavalerie légère à lever par réquisition en exécution de l?ordre de Sa Majesté en date du 18 avril 1815. ? Archives nationales, AF/IV/1941, ministère de la Guerre. État de répartition des fonds à faire aux légions de la gendarmerie impériale qui doivent fournir des chevaux pour la remonte de la cavalerie, arrêté par le ministre de la Guerre à Paris le 19 avril 1815. ? SHD C16/9, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, le commissaire ordonnateur Barbier, chef de la 9e division du ministère de la Guerre au baron Salamon, chef de la 11e division du même ministère, 25 avril 1815.

[62] A Davout, Correspondance, n° 21732, Paris, 27 mars 1815, n° 21811, Paris, 15 avril 1815. - SHD, C16/9, Correspondance militaire générale pendant les Cent-Jours, le ministre de la Guerre, Paris, le 24 avril 1815. Le destinataire n?est pas identifié.

[63] SHD, C15/5 Armée du Nord, Soult à Napoléon, 20 juin 1815.

[64] Archives nationales, AF/IV/1941, Davout, Rapport à Sa Majesté l?Empereur, 5 avril 1815. ? Davout à Mollien, Correspondance du maréchal Davout, 17 avril 1815. ? Napoléon à Caffarelli, Correspondance, n° 21891, 11 mai 1815.